Qui est donc Alice Rahon, cette poétesse surréaliste française devenue peintre au Mexique où elle avait fuit la Seconde Guerre mondiale avec son mari et où elle a peint quelque 700 oeuvres « inclassables » sans pour autant être connue ou reconnue en France ? C’est tout l’enjeu du livre que la spécialiste de la peinture mexicaine Christine Frérot (qui a déjà publié chez Riveneuve le beau livre « Fictions mexicaines, 38 témoins de l’art du XXe siècle ») a présenté jeudi 16 décembre à l’Institut culturel mexicain de Paris. En compagnie de l’attaché culturel mexicain et d’une quinzaine aficionados, l’autrice a rappelé l’enquête qu’elle a dû mener pour trouver des informations sur une femme à la fois très mondaine (amante de Picasso, amie de Man Ray, Frida Kahlo ou Diego Rivera…) et très discrète, sans enfant et divorcée, dont l’oeuvre n’a pas été réunie et n’est partiellement connue qu’au Mexique et aux Etats-Unis où les plus grands musées et collectionneurs commencent à acquérir ses tableaux. Le galeriste et ancien directeur d’institut français Marc Monsallier et la conservatrice en chef des arts graphiques et des peintures au musée d’Orsay Leila Jarbouai ont souligné l’extraordinaire travail de défricheuse de Christine Frérot.
Alice Rahon et le Mexique. La révélation de l’art
Malgré une brève notoriété à Paris comme poétesse invitée par André Breton au sein du cercle surréaliste, malgré la rencontre avec René Char, la collaboration avec Man Ray et la relation avec Picasso, Alice Rahon (1904-1987), franc-comtoise et bretonne par choix, reste une parfaite inconnue en France. Pourtant, celle qui va devenir peintre au Mexique et croiser Frida Kahlo, Diego Rivera et Octavio Paz, a vu son œuvre recherchée par les collectionneurs dès les années 1940. La Franco-Mexicaine est aujourd’hui présente dans de grands musées autant en Amérique latine qu’aux États-Unis.
Alice Rahon est une artiste libre, qui ne cherche pas à représenter fidèlement son pays d’adoption, mais puise son inspiration dans les grands espaces, la nature omniprésente, les villes grouillantes et les fêtes bigarrées. Elle impose et séduit avec un art intimiste, inclassable, dans lequel la poésie des images s’est substituée à celle des mots.
Ce livre rend hommage à l’une des artistes étrangères qui a le plus contribué à ouvrir aux formes de l’abstraction une scène artistique alors dominée par la figuration engagée de l’École mexicaine.