C’est dans le mythique bar 61, près du canal de l’Ourcq à Paris, qu’une trentaine de personnes, dont plusieurs journalistes, ont retrouvé, le 16 décembre, le politiste Jérôme Heurtaux autour de son essai d’actualité Le droit international est-il mort à Gaza ? Le lieu porte son histoire : créé il y a seize ans par le grand reporter Rémy Ourdan, comme l’a exposé la programmatrice et ancienne journaliste Yaël Caux, il est très vite devenu un repère des correspondants de guerre, organisant des débats et des expositions sur tous les désordres du monde.
L’auteur, qui a caressé le désir de faire du journalisme avant d’opter pour une carrière académique, a pu témoigner de son effarement face à l’énormité des crimes commis à Gaza et au décalage avec ce qu’on en disait dans les médias mainstream. Tout est euphémisé, avec, pendant un an et demi, le narratif du gouvernement israélien pris pour seule boussole : le « droit d’Israël de se défendre » au nom de « la paix, la démocratie et la lutte contre le terrorisme », entraînant ainsi la confusion entre droit de la guerre et droit dans la guerre. Les deux ont été largement bafoués, jusqu’en France, où un ministre des Affaires étrangères, Stéphane Séjourné, en refusant d’appuyer la plainte de l’Afrique du Sud sous prétexte que « accuser l’État juif de génocide, c’est franchir un seuil moral », s’est assis sur la Convention de 1948 sur le génocide, pourtant adoptée au palais de Chaillot, à Paris, tout comme la Convention des droits de l’homme !
Voilà pourquoi, au-delà de l’incapacité de cette convention, pourtant clairement élaborée pour empêcher le renouvellement du génocide après la Seconde Guerre mondiale, à arrêter les massacres, de nombreux responsables politiques, médiatiques ou industriels partout dans le monde, bien au-delà des militaires ou dirigeants israéliens directement génocidaires, ont à redouter des poursuites au nom du droit international. Celui-ci, clairement élaboré par les Occidentaux, est repris par des pays du Sud global pour réclamer des comptes. On ne s’étonnera pas que, finalement, la Cour pénale internationale (qui poursuit des individus), née plus tard de la logique de la Convention de 1948, ne soit pas reconnue par la Russie, la Chine, les États-Unis ou Israël, et qu’elle soit aujourd’hui trop faiblement défendue, alors que Trump s’acharne sur elle, par l’UE et la France. Des plaintes commencent à lui parvenir contre des soldats binationaux ou des dirigeants israéliens (ceux du Hamas sont déjà morts), mais aussi, pour complicité, contre Giorgia Meloni, Emmanuel Macron ou Sébastien Lecornu, tandis que la Cour internationale de justice (qui traite des États), instruit contre Israël mais aussi contre l’Allemagne pour complicité.
Mais ces cours sont très lentes, tandis que les cours nationales, par la compétence universelle, peuvent poursuivre dans des délais plus réduits. Le droit international n’est pas mort : il ne fait que grandir.
Acheter le livre :











